Bon, bon, bon, vous me connaissez, quand je dois écrire une chronique mi-figue, mi-raisin, ce n’est pas montagne du fun ! A l’issue de cette lecture j’ai vraiment des sentiments contraires. Est-ce que j’aimé ? En partie. Est-ce que je me suis ennuyée ? En partie aussi.
Aujourd’hui, cette chronique difficile est donc celle de L’accident de l’A35 publié le 19 septembre 2019 aux éditions Sonatine
4ème de couverture
Avocat respectable dans une petite ville alsacienne, Bertrand Barthelme, trouve la mort une nuit dans un accident de voiture. Lorsque l’inspecteur Georges Gorski vient annoncer la triste nouvelle à sa femme, celle-ci lui apparaît peu affectée. Une seule question semble l’intriguer : que faisait son mari sur cette route au milieu de la nuit ? Question banale en apparence, mais qui va vite mener Gorski à s’interroger sur la vie de cet homme et de ce couple de notables apparemment sans histoires.
Après La Disparition d’Adèle Bedeau, on retrouve dans cette nouvelle enquête de l’inspecteur Gorski tout le talent de Graeme Macrae Burnet pour disséquer des vies réputées ordinaires, où la faille n’est jamais loin. Tout le long d’une intrigue passionnante, il nous fait pénétrer dans un théâtre de solitudes peuplé de personnages étouffés par leurs existences, au bord de la rupture. Un nouveau coup de maître.
Une enquête à l’ancienne
L’A35 est une autoroute traversant l’Alsace du Nord au Sud. C’est dans cette région que l’auteur pose bagages pour son intrigue. L’inspecteur Gorski réside et travaille à Saint-Louis, une ville relativement « dans son jus », terne, triste ou rien de fou ne se passe jamais. George Gorski est un flic impliqué mais fortement porté sur l’alcool et dont la vie privée s’effrite doucement depuis le départ de sa femme et de sa fille.
Un accident banal sur l’autoroute. Une veuve éplorée qui cherche des réponses. Un fils qui mène l’enquête. Et enfin, un flic alcoolique mais très professionnel qui va venir mettre son grain de sel dans les affaires secrètes de cette petite ville de Saint Louis. Ça c’est le topo de départ. Mais très vite l’auteur nous amène sur un autre terrain que celui de l’enquête. Scène après scène, telle une pièce de théâtre, il va nous faire entrer dans la vie quotidienne des personnages. Un déjeuner au restaurant, une histoire d’amour adolescente, l’interrogation d’un suspect, tout est prétexte à décortiquer la vie et le caractère des personnages.
Un rythme déstabilisant
Ce parti-pris sur la forme, donne une touche très personnelle à la plume de l’auteur. L’enquête avance à pas de fourmi, avec les moyens d’investigations d’il y a encore quelques années. Pas de smartphone mais des carnets et un stylo. Pas de portable mais des cabines téléphoniques. Je m’imaginais presque les scènes avec un filtre sépia en lisant cette histoire. Cet aspect est, je dois le reconnaître, assez immersif. Au début de ma lecture, j’ai souvent été comme hypnotisée par certains chapitres. Il ne se passait pas grand-chose, mais sous la plume de l’auteur, un simple déjeuner au restaurant prenait la forme d’une fresque sociale passionnante.
Et puis… mon intérêt s’est étiolé. Au fur et à mesure des chapitres, j’avais beau apprécier cette intrusion totale dans la vie quotidienne des personnages, je n’avais qu’une envie : que l’enquête avance. J’aurais aimé, peut-être, une petite montée en puissance dans la deuxième moitié du roman qui m’aurait raccrochée au wagon. Malheureusement, ce ne fut pas le cas et j’ai terminé le roman, laborieusement, en lisant même parfois quelques pages en diagonale. Le dénouement, qui en ravira certains j’en suis certaine, m’a personnellement laissée sur ma faim. J’avoue que je n’étais pas mécontente de passer à une nouvelle lecture.
En bref
L’accident de l’A35 est un roman policier particulièrement original sur sa forme et sur son rythme. Je dois reconnaître que l’auteur possède un vrai talent pour nous faire entrer dans l’intimité des personnages et ainsi provoquer chez le lecteur un attachement rapide à leurs destins. La plume est belle, travaillée et fluide en même temps, mais le rythme de l’enquête, beaucoup trop lent, m’a lassée passée la seconde moitié du roman. Pour être tout à fait honnête, je sortais de la lecture d’un Gilberti qui était à l’opposé le plus total concernant le rythme. Alors forcément, le changement a été brutal.
Ce livre est vraiment plein de qualités. Je suis persuadée que de nombreux lecteurs se délecteront de ce style si particulier, tout en douceur. Ce type de roman est rare de nos jours à une époque où, beaucoup de thrillers enchaînent les chapitres courts et les cliffhangers à la pelle. Mauvais timing de lecture ? Peut-être. Malgré tout, le résultat est mitigé pour moi. Mais comme toujours, si ce roman vous tente, ne m’écoutez pas et foncez !