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Roman

Les sept morts d’Evelyn Hardcastle de Stuart Turton

Bon… Dire que cette chronique est difficile à écrire est un euphémisme. Il va falloir rassembler mes neurones et mes pensées après cette lecture si atypique. Je comprends mieux maintenant les telles dissonances entres les avis. Entre ceux qui ont éprouvé un immense coup de coeur et ceux qui ont abandonné. Personnellement mon avis ne sera pas aussi tranché. En route pour le manoir de Blackheath.

4ème de couverture

Ce soir à 11 heures, Evelyn Hardcastle va être assassinée. 
Qui, dans cette luxueuse demeure anglaise, a intérêt à la tuer ? 
Aiden Bishop a quelques heures pour trouver l’identité de l’assassin et empêcher le meurtre. 
Tant qu’il n’est pas parvenu à ses fins, il est condamné à revivre sans cesse la même journée. 
Celle de la mort d’Evelyn Hardcastle.

Meurtre chez les mondains

Si Stuart Turton ne nous donne pas d’indication temporelle claire, le décor et la culture nous placent, il semblerait, en Angleterre au début du 20ème siècle. La famille Hardcastle organise un bal à Blackheath, sa vaste demeure au milieu de la forêt. Une fête en grande pompe pour le retour de leur fille Evelyn partie à Paris depuis plusieurs années. Mais Evelyn va être assassinée, ce soir, à 23h.

Voilà, ça, c’est le postulat de base. Sauf que, c’est bien plus compliqué que cela et cette enquête ne va pas se résoudre d’une manière classique. Notre enquêteur principal se prénomme Aiden Bishop. Il lui est donné 8 jours pour résoudre ce meurtre. Seulement, il s’agit pour lui de revivre 8 fois la même journée dans le corps de huit hôtes différents. Tour à tour, il se glissera dans le corps de huit des invités présents pour tenter de résoudre le mystère de la mort d’Evelyn. Pourquoi ? Il n’en a aucune idée puisqu’il ne garde aucun souvenir de sa véritable identité. Son seul espoir de sortir de cette boucle sans fin, de retrouver sa liberté, passe par la résolution de ce meurtre.

Dans cette journée sans fin, c’est un homme étrange affublé d’un masque de médecin de peste qui va dicter les règles. Le maître du jeu en quelque sorte. En effet, dans ce lieu qui défie les lois du temps, Aiden n’est pas le seul à concourir pour sa liberté. D’ailleurs, un adversaire, un redoutable valet de pied va s’acharner à l’assassiner et à le traquer, journée après journée, hôte après hôte.

Concentration est le maître mot

Concrètement, ce livre n’est pas une lecture facile. Si vous voulez un livre popcorn que vous pouvez lire en laissant une partie de votre cerveau au repos, passez votre chemin. En revanche, si vous rechercher une histoire à la construction narrative inédite, alors il se pourrait que ce livre soit fait pour vous.

Au fil des journées et des hôtes du personnage principal, il vous faudra faire preuve de vigilance constante pour noter les petits détails de l’enquête. Chaque mot, chaque événement peut avoir une répercussion sur le cours des choses. Oui, il y a beaucoup de personnages, mais en étant attentif, on apprend à les découvrir, à se les remémorer au fil des rencontres. Si besoin, une petite liste est disponible à la fin du roman.

Cependant, si tout paraît compliqué d’un premier abord, lorsque les nœuds commencent à se démêler, c’est un plaisir fou. J’ai lu que certains avaient été déçus par la fin. Personnellement, je l’ai trouvé parfaite. Je n’en attendais pas d’autre. Tout s’imbrique et se résout terriblement bien. Les sept morts d’Evelyn Hardcastle est un pur ovni littéraire. Une histoire d’une très grande complexité mais dont la cohérence est remarquable. L’auteur, pour un premier roman, a produit une oeuvre on ne peut plus magistrale. C’est une prouesse narrative totalement novatrice. Comment imaginer un tel scénario et surtout le faire évoluer aussi brillamment ? Vraiment bravo !

– Vous étiez médecin, réplique-t-il. Puis majordome. Aujourd’hui vous êtes un play-boy, et demain vous serez banquier. Aucun d’entre eux n’est vraiment vous. Votre visage et votre personnalité vous ont été pris quand vous êtes arrivé à Blackheath, et on ne vous les rendra que quand vous en partirez.

En bref

Je ne vous cache pas que j’ai parfois dû m’accrocher durant ma lecture. Certaines mises en place sont quelques peu ardues. Il faudra vraiment faire preuve de concentration, prêter attention aux détails et se laisser progressivement envoûter par le lieu et les personnages.

Malgré quelques moments un peu en deçà, dans sa totalité, le roman est grandiose. Il ne faut pas tourner autour du pot : Stuart Turton a un talent fou et une imagination débordante. Il nous offre une prouesse narrative qui ferait rougir les plus grands auteurs. Ce qui est sûr, c’est qu’en terminant ce roman on se sent presque victorieux d’être arrivé à dompter les rouages de Blackheath en même temps que ce cher Aiden Bishop.

Si vous souhaitez lire ce que vous n’avez encore jamais lu, si vous souhaitez un challenge littéraire, alors foncez et vivez cette expérience narrative hors du commun. Seulement, soyez conscients que la totalité de votre cerveau sera mise à l’épreuve.