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Roman

Son vrai visage de Karin Slaughter

Son vrai visage est le dernier thriller de l’auteure américaine à succès Karin Slaughter. Apparemment c’est un peu une taulière du thriller Outre-Atlantique mais je dois avouer que je n’avais encore lu aucun de ses romans. J’ai accepté de recevoir ce roman de la collection Noir des éditions Haper Collins lors d’une sélection Masse Critique sur Babelio. Je reconnais que de moi-même je n’aurais peut être pas été instinctivement vers ce roman. La 4ème de couverture m’intriguait mais sans plus. Finalement que j’ai bien fait de lire ce livre car ce fut vraiment une très agréable surprise.

4ème de couverture

Le métier de Laura consiste à soigner les troubles de la parole. Dans sa profession, elle est reconnue et admirée. Elle a pourtant plus de difficultés quand il s’agit de faire parler sa fille de trente ans, qui semble collectionner les échecs en tout genre.
Il aura suffi qu’elle l’invite au restaurant pour avoir une vraie discussion mère-fille,
Il aura suffi qu’un gamin armé entre en scène,
Il aura suffi d’un unique coup de couteau,
Pour que tout bascule.
Andy vient de voir sa mère tuer un homme. Sans une once d’hésitation. Efficace. Calme.
Andy vient de comprendre que sa mère n’est peut-être pas celle qu’elle prétend.
Et, maintenant que les masques tombent, la voix de ces deux femmes pourrait bien ne plus jamais se faire entendre.

Une densité sur le fond

En lisant la 4ème de couverture, comme moi, vous vous êtes peut-être dit : ok encore une histoire de secret de famille, de passé tortueux, etc. Vous n’avez pas complètement tort mais ce n’est vraiment qu’une toute petite partie émergée de l’iceberg. Ce qui fait la force de ce roman c’est sa densité. En lisant les premiers chapitres, vous aurez beaucoup de mal à vous figurer ce que recèle finalement le cœur de cette histoire.

Tout part de cette fusillade dans un café, alors qu’Andy et sa mère Laura sont en train de déjeuner. Un fou qui fait irruption dans la petite vie tranquille de ces gens pour simplement tirer dans le tas. Cet événement va réveiller l’instinct primaire de Laura, protéger sa fille à tout prix. Mais loin d’être une quinquagénaire terrifiée, elle va agir comme une femme entrainée à ce type de situation, prête à agir avec sang-froid. Elle l’orthophoniste douce, attentionnée, affaiblie par un cancer du sein tout juste guéri va se transformer en véritable machine à tuer comme le relaieront plus tard les chaines d’infos.

Cet événement, aurait presque pu en rester là, se finissant finalement bien en laissant les deux héroïnes saines et sauves. L’acte de mise à mort du tireur par Laura aurait pu être classé en légitime défense. Mais tout cela ne sera que le début d’une course infernale. Après ce drame, Laura n’est plus la mère aimante et douce qu’Andy a connue. Elle devient brusquement une femme glaciale qui lui ordonne de partir, de fuir et de récupérer une voiture 5 états plus loin dans un mystérieux box de location. Andy va donc parcourir des milliers de kilomètres pour sauver sa peau mais aussi découvrir qui est vraiment celle qui a été sa mère durant les 31 dernières années.

Le roman est dense, sans être pesant ni ennuyeux. Les ramifications de l’intrigue sont bien plus profondes et tortueuses que le simple résumé au dos du livre. J’ai été vraiment agréablement surprise par ce thriller psychologique qui aurait pu nous proposer un enchaînement de déjà-vus du genre. Le style d’écriture est très agréable, fluide sans être trop simple. Comme pour le fond, l’écriture fait preuve d’une densité très agréable qui apporte un vrai plus à ce roman.

Une densité sur la forme

A la réception du livre, quand j’ai vu qu’il faisait plus de 600 pages, j’ai eu une petite sueur froide. Le thriller psychologique c’est quand même un sous genre assez casse-gueule du thriller. Si la mayonnaise ne prend pas, ça peut très vite devenir une torture. Heureusement pour moi, ce ne fût absolument pas le cas.

J’ai tout de même été déroutée au départ par la construction du récit. Je suis habituée aux chapitres relativement courts pour ce type de roman. Avec presque un cliffhanger à chaque fin de chapitre pour inviter à poursuivre encore et toujours à tourner la page suivante. Mais là encore l’auteure choisit d’installer une atmosphère et une densité dans son roman en nous proposant des chapitres plus longs qu’à l’accoutumée. Les chapitres font rarement moins de 40 ou 50 pages mais pourtant à aucun moment je n’ai trouvé ça trop long. Ce découpage était en parfaite adéquation avec le rythme du récit, ni trop lent ni trop rapide. Un espèce de rythme entre deux très bien orchestré qui permet d’installer une vraie atmosphère sans laisser toutefois le temps au lecteur de s’ennuyer.

Sans trop vous en dévoiler, le récit alterne entre deux époques 2018 et 1986. Mais là encore, l’auteure prend son temps. Quand elle coupe son récit pour nous ramener dans le passé, ce n’est pas juste pour un petit effet suspens d’une dizaine de pages. Non non, ces passages s’étendent parfois sur plusieurs centaines de pages. Le lecteur prend ainsi le temps de s’ancrer véritablement dans l’époque, le décor et l’ambiance du récit qui petit à petit éclairera les questions du présent.

Laura levant la main.
Sa paume transpercée par la longue lame.
Arrachant le couteau des mains de l’homme.
Plantant la lame dans son cou d’un revers de main.
Du sang.
Tellement de sang.

En bref

Avec Son vrai visage, Karin Slaughter a réussi un exploit. Celui de me captiver et de me faire apprécier un thriller psychologique de 600 pages au rythme bien moins vif que d’habitude. Mais c’est justement cette différence qui fait toute la force du roman. Dans la plupart des thrillers psychologiques, il manque cette densité qui permet au lecteur de vraiment connaitre les personnages en profondeur et de s’y attacher. Ici, on plonge entièrement dans la vie actuelle des personnages mais on décortique aussi tout un pan de leur passé. Comme eux, petit à petit, on tente de rapprocher les morceaux de vérité pour reconstruire le puzzle complet.

Au-delà de la thématique du lien mère-fille, le roman nous délivre une réflexion sur les conséquences du mensonge dans l’équilibre familial et dans la construction identitaire. Si vous cherchez un thriller psychologique au style travaillé, dense, avec une histoire profonde, complexe et captivante alors je ne peux que vous conseiller de lire Son vrai visage.