Maternité

Récit d’accouchement #Partie 1

Je l’avoue, j’ai complètement délaissé le blog sur la deuxième moitié de ma grossesse. Pourtant vous pourriez me dire qu’avec le confinement j’aurais largement eu le temps. Peut-être, mais j’avais un peu perdu l’envie. J’avais du mal à mettre des mots sur ces journées assez étranges. Je comptais les semaines qui me rapprochait de la sortie de la prématurité, de la rencontre. Aujourd’hui j’ai envie de reprendre un peu du service par ici. Cela commence forcément par le récit de cet accouchement tout doux (en grande partie) le 6 juin dernier.

Le début du travail

Le 5 juin à 40SA+2, je me réveille 18h00 d’une bonne sieste. J’ai dû faire 2 ou 3 siestes pendant ma grossesse seulement. Je déteste ça, j’ai l’impression de perdre mon temps. Mais ce jour-là, j’en avais vraiment besoin sans savoir pourquoi. Peu de temps après m’être levée, je me suis vite sentie étrange, pas bien dans mes baskets. J’ai vite commencé à avoir mal dans le bas du dos. Vous savez, ces douleurs diffuses qu’on a avant l’arrivée des règles. Sans y faire trop attention au départ, ces douleurs ont eu tendances à revenir. Revenir assez régulièrement pour attirer mon attention. Petit à petit, la douleur du bas du dos s’est propagée dans le bas ventre. Au départ, je n’ai pas pensé que cela pouvait être de « vraies » contractions. Sur les derniers mois de grossesse j’ai eu très souvent des « fausses » contractions, les Braxton-Hicks qui durcissent l’intégralité du ventre sans pour autant faire mal. Je me disais que le jour J ce serait la même chose mais en version douloureuse. Alors je ne me suis pas trop inquiété sachant que mes lombaires et mon nerf sciatique prenaient cher depuis quelques jours.

J’ai tout de même lancé mon application qui permet de noter les contractions sur mon téléphone. Chaque salve de mal de dos+ventre je notais. On n’était pas vraiment sur de la régularité mais ça commençait à y ressembler, à intervalles de 15-20 minutes. J’ai laissé passer la soirée sans trop rien dire à Monsieur. Je ne savais pas trop quoi en penser. Je sentais tout de même que les douleurs gagnaient en intensité. Par moment pendant près d’une minute je ne pouvais plus parler seulement me concentrer sur ma respiration. Mon copain ne voulait pas trop y croire et m’a fait du damage control toute la soirée « Nonnnnnn mais c’est du faux travail je pense ». A 23h00 on monte se coucher. L’application de contractions me dit « Tenez-vous prête à partir ». J’ai une contraction toutes les 8-10 minutes environ. Je me relève 15 minutes plus tard pour aller me dandiner sur mon ballon de grossesse tant la dernière contraction était violente. Je préviens Monsieur que je reviens le réveiller si on devait partir à la maternité dans la nuit, qu’il dorme en attendant. Pendant les 3 heures qui ont suivi, j’ai vraiment bien jonglé.

A 2h00 du matin, après 3 heures de ballon, une douche brûlante, 2 Spasfon et un appel à une sage-femme de garde de la maternité, les douleurs sont insupportables. Les contractions reviennent toutes les 4 minutes pendant une minute. L’application me dit « C’est l’heure de partir ». Je retourne dans la chambre et je m’entends encore dire « Lapin (oui le petit surnom de mon mec c’est Lapin…😅) réveille-toi, il faut qu’on y aille j’ai vraiment trop mal ». Il m’a impressionné. En 10 minutes il était levé, douché, il m’aidait à finaliser la valise entre deux contractions qui me faisaient maintenant pleurer de douleur. Au moment de partir, la dernière contraction était tellement forte que je pleurais en vomissant au-dessus des toilettes (oui, j’ai commencé le glamour très tôt pour cet accouchement). Un sac poubelle sous le bras pour la voiture, on est parti direction la maternité à 15 minutes de route pour rencontrer bébé (enfin à ce stade j’espérais encore que ce soit bien du vrai travail et qu’on ne me renvoie pas chez moi avec de telles douleurs !) . Quatre contractions plus tard, après avoir cru mourir dans la voiture, on se garait devant l’entrée des urgences et de la maternité de la clinique.

Le travail en salle de naissance

Protocole Covid oblige, je dois d’abord rentrer seule, avec mon masque, dans la maternité pour qu’on m’examine. Si le travail actif est confirmé, Monsieur pourra me rejoindre avec toutes les valises pour qu’on se « confine » en salle de naissance. Il est deux 2h30 du matin quand une sage-femme de garde, adorable, m’installe dans une petite salle aux lumières tamisées pour un monitoring. Je suis plutôt contente de vite savoir ce qu’il en est car depuis qu’on est parti de chez nous j’ai très peu senti le bébé bouger. J’espère qu’il gère bien les contractions. 20 minutes plus tard, les graphiques sont sans équivoque : les contractions sont assez importantes et surtout bien régulières. Le cœur du bébé lui va très bien, le Haricot gère les contractions comme un champion. La sage-femme m’amène dans une autre salle pour le sacro-sain examen du col pour déterminer où en est le travail. Après deux contractions dans le couloir qui m’ont forcée à m’arrêter pour respirer et me concentrer de toute mes forces pour ne pas hurler, on arrive dans la salle d’examen.

Je ne vais pas le répéter 10000 fois dans cet article, mais tout le personnel médical a été d’une bienveillance sans égale durant toute cette nuit. Les sages-femmes, les infirmières, l’anesthésiste, les puéricultrices, les gynécologues. Je me suis vraiment sentie écoutée, soutenue, valorisée et ça m’a tellement aidé à accueillir ce bébé dans la douceur.

Donc, je m’installe sur la table d’examen et la sage-femme me demande en rigolant :
– Alors vous voudriez être dilatée à combien ?
– Pour avoir la péri c’est dilatation à 3 c’est ça ?
– Oui c’est bien ça.
– Alors va pour 3 !

Après un examen du col extrêmement douloureux entre deux contractions elle m’annonce une dilatation à un bon 6 bien large. J’y crois à peine. Elle me dit que j’ai vraiment hyper bien géré le début du travail chez moi et qu’il était temps que je vienne. Je crois que les crampes d’endométriose ça modifie vraiment le curseur de douleur… Quand elle m’annonce que je peux appeler mon conjoint et qu’on va passer en salle de naissance, je réalise à peine. C’est pour cette nuit. Après trois ans de galère, de douleurs, d’opération, d’infertilité et de PMA je vais enfin rencontrer mon bébé.

J’appelle Monsieur pour lui dire que cette fois on y est, le Haricot arrive. Il peut donc venir dans le hall d’entrée avec toutes les valises. Oui LES valises… Je suis du genre à prévoir large du coup il débarquera avec : une grande valise de voyage pour moi, une petite valise cabine pour le bébé, le sac de naissance et le coussin de maternité. Autant dire qu’il est chargé comme une mule en arrivant dans le hall des urgences gynéco ! Avant d’aller le chercher pour le faire entrer en salle de naissance, la sage-femme me propose de me poser la perfusion et de faire la péridurale étant donné que l’anesthésiste est dans le coin. J’accepte volontiers sachant que ma tendre moitié est un phobique des aiguilles (même quand ce n’est pas pour lui). Donc, si on peut éviter qu’il tourne de l’œil dès le début ce n’est pas plus mal… Et puis j’ai tellement, tellement mal à chaque contraction que je veux juste être soulagée. 5 minutes plus tard l’anesthésiste arrive. Dans le service on le surnomme « Speedy Gonzales » pour sa rapidité à poser les péridurales sans se planter. Visiblement c’est mon soir de chance. Effectivement en 10 minutes, sans douleur, dans le calme et avec des paroles douces et encourageantes, la péri est posée. Ce médecin est d’une efficacité sans faille. Loïc, je me souviendrai de lui, l’homme qui pose des péri plus vite que son ombre.

Quelques minutes plus tard, on fait entrer Monsieur dans la salle de naissance. Notre nuit dans cette bulle de douceur peut commencer. La salle de naissance est vraiment chouette : il y a une baignoire, un ballon de grossesse, un coussin de maternité énorme, une banquette pour que le conjoint puisse dormir, des lumières tamisées. Avec le recul, j’ai adoré être en travail pendant la nuit, coupée du temps et du reste du monde. Juste tous les deux à attendre que notre bébé pointe le bout de son nez au matin, à regarder le graphique des contractions sur le monito et à écouter son cœur.

Je ne vais pas vous faire le compte rendu détaillé de toutes ces heures nocturnes. Globalement la péridurale a mis pas mal de temps à faire effet étant donné que je suis arrivée avec un travail déjà bien entamé. Il aura fallu une heure pour commencer à sentir les effets. De plus, le cathéter était légèrement latéralisé à gauche ce qui veut dire que ma jambe gauche était une patte folle incontrôlable (j’ai d’ailleurs mis un énorme coup de genou dans la tête de la sage-femme lors d’un examen du col à 6h00 du mat. Un fou rire inoubliable) tandis qu’à droite je ressentais encore une grosse partie des contractions. En changeant de position on est finalement parvenu à disperser le produit de la péridurale des deux côtés. A 9h00 du matin, je suis à dilatation complète, on va pouvoir attaquer les choses sérieuses.

La naissance

La sage-femme de jour qui a remplacé celle de la nuit quelques heures plus tôt me dit que même si je suis à dilatation complète, elle préfère attendre que le bébé descende tranquillement dans le bassin pour m’éviter trop d’efforts. On fait quand même un test de poussée sur une contraction pour voir ce que ça donne. Et là, je me dis que ça va être sportif. Franchement, les poussées on ne se rend pas compte avant de l’effort que ça demande. C’est vraiment hyper intense on doit y mettre toute son énergie (après une nuit sans sommeil ce n’est pas évident) d’autant plus qu’avec la péridurale les sensations sont très atténuées. La sage-femme repart en nous disant qu’elle se laisse une heure et qu’ensuite on y va, on sortira ce bébé.

Avec Monsieur on décide qu’on va profiter de cette dernière heure pour se reposer et dormir un peu avant la dernière ligne droite. Alors qu’on commençait à vraiment plonger dans le sommeil, vingt minutes plus tard la sage-femme revient dans la salle de naissance accompagnée de la puéricultrice :
– Le bébé n’a pas trop l’air d’aimer être où il est. On ne va pas attendre plus. On va faire sortir ce bébé.

C’est à partir de là que ma zénitude de la nuit s’est envolée. Le monito avait été passé en muet pour qu’on puisse dormir. C’est en tournant la tête pour regarder l’écran que j’ai vu que le cœur du Haricot ne battait qu’à 65 alors que toute la nuit il avait été autour des 140. J’ai commencé à paniquer. J’ai eu peur pour mon bébé, peur d’une césarienne en urgence (une de mes plus grandes peurs pour l’accouchement) mais encore une fois, la sage-femme a été extrêmement bienveillante et rassurante pour m’aider à rester focalisée sur l’essentiel : mettre au monde ce bébé rapidement.

Elle m’a injecté de l’ocytocine dans la perf pour augmenter les contractions et j’ai commencé à pousser, pour de vrai, de toutes mes forces. A chaque contraction j’avais le temps de pousser trois fois. Mais à chaque contraction le cœur du Haricot baissait avant de revenir à la normale une fois la contraction passée. J’ai du demander 50 fois : « Il va bien ? Il va bien ». J’ai vraiment fait mon maximum à chaque poussée, je le visualisais en train de descendre, je sentais aussi qu’il avançait doucement dans le bassin. Après 20 minutes de poussées, on voyait apparemment ses petits cheveux, mais ça n’allait pas assez vite et quelque chose bloquait sa descente. La sage-femme nous a expliqué calmement qu’elle allait appeler la gynécologue de garde pour faire sortir ce bébé rapidement. Qu’elle allait sans doute utiliser une petite ventouse pour le guider. Elle a dit à sa collègue puéricultrice : « Va me chercher Sophie ».

Sachant que cette clinique est celle où j’ai suivi mon parcours PMA, je connais à peu près tous les gynécos et biologiste du secteur. J’ai vite compris que « Sophie », c’était le Dr Sophie F. le médecin qui avait réalisé ma ponction gagnante pendant ma FIV de juillet 2019. Elle avait prélevé les ovocytes qui avait donné vie au Haricot et maintenant elle allait m’aider à le mettre au monde. La boucle allait être bouclée. Deux minutes plus tard « Sophie » était là avec cette espèce de grosse machine qui ressemble à une bonbonne de gaz avec une ventouse au bout. J’ai assez peu de souvenir des 5 minutes qui ont suivi, c’est flou, c’est allé vite. J’avais peur, j’étais épuisée par les poussées, je voulais juste faire sortir ce bébé et l’entendre crier. Elle a posé la ventouse, j’ai poussé deux fois et j’ai senti la tête puis tout le corps de mon bébé se faufiler vers l’extérieur. A 10h00 tout rond, le 6 juin 2020 notre bébé miracle est né.

La sage-femme l’a posé sur moi, 10 secondes plus tard il criait, son papa et moi on pleurait. Moi à chaudes larmes en souriant de bonheur. Lui tout en retenu mais avec tellement d’émotions. Le bébé sentait tellement bon, il était tout lisse, tout propre, il avait de beaux petits cheveux. Il était tout chaud. Je n’oublierai jamais cette chaleur, cette odeur (celle du liquide amniotique) tellement rassurante pour lui et moi. Ce moment, ces quelques secondes j’aurais voulu qu’elles durent pour toujours. Je pense qu’aucun moment de ma vie ne sera plus intense que celui-ci. On a beau le rêver, l’imaginer, le vivre c’est tellement incroyable, c’est une explosion d’émotions indescriptibles, un amour tellement immense qui se créé en l’espace d’un instant.

Pour la fin de cette partie de l’histoire, si le cœur du bébé faiblissait c’est tout simplement qu’il avait fait un tour de cordon autour de son cou (en plus d’un autre nœud en forme de Bretzel plus loin sur le cordon). Donc, à chaque contraction, à chaque poussée vers le bas, le cordon serrait un peu trop son petit cou et son cœur n’aimait pas du tout. Heureusement tout s’est bien passé grâce à cette équipe médicale incroyable. Je ne les remercierais jamais assez.

La sage-femme nous a demandé : « Alors comment il s’appelle ce petit bout ». Et c’est son papa qui a répondu :

– Malo, il s’appelle Malo.

L’après-naissance et le séjour à la mater dans un prochain article 😉